Pourquoi la voiture reste indispensable en Ile-de-France




Si la région parisienne affiche son ambition de réduire la place de la voiture, cela reste hautement irréaliste à moins de changer profondément de politique d’aménagement des territoires, alerte le think tank du Forum Vies Mobiles. Une prise de conscience nécessaire alors que la grève qui démarre ce 5 décembre, avec des transports en commun paralysés, remet la voiture au centre des déplacements.

L’automobiliste, une espèce en voie de disparition à Paris et dans toute la région Ile-de-France? C’est ce qu’on pourrait croire avec la mise en place de la Zone à faibles émissions et, plus généralement, la politique « anti-voiture » mise en avant depuis quelques années dans la capitale.

Mais, en réalité, la voiture individuelle serait loin d’avoir dit son dernier mot. C’est ce que souligne une étude récente du Forum Vies Mobiles, un institut de recherche indépendant soutenu par la SNCF qui explore l’avenir de nos déplacements.

Une région pas vraiment prête au zéro voiture
L’idée: évaluer la faisabilité d’une Ile-de-France sans voiture, d’où le nom de cette étude, « Post-Car ». La région paraît à première vue une bonne candidate pour réaliser cet objectif, avec notamment un réseau dense de transports en commun.

« Mais c’est oublier que 70% des déplacements se font de périphérie à périphérie, avec beaucoup moins d’alternatives à la voiture pour les déplacements du quotidien », tempère Sylvie Landriève, co-directrice du Forum Vies Mobiles.

Des politiques publiques incohérentes
L’étude pointe en particulier une incohérence des politiques publiques qu’on peut résumer ainsi: une volonté affichée de trouver des solutions à la pollution principalement d’origine automobile, sans pour autant déployer les bonnes méthodes pour y parvenir.

« On reste engagé dans une course à la taille avec les autres grandes villes mondiales alors que près d’un habitant sur deux en Ile-de-France souhaite quitter la région, ce qui reflète un certain mal-être », explique Sylvie Landriève.

Et cette croissance continue de la population encouragée par les pouvoirs publics annihilerait tout effort pour réduire la congestion et la pollution. Si la distance parcourue par personne et par jour tend ces dernières années à se stabiliser, la somme totale de ces déplacements continue de progresser. On compte ainsi 43 millions de déplacements par jour en Ile-de-France, en hausse de près de 5% entre 2010 et 2018.



Un aménagement du territoire à revoir
La structure même de la région poserait problème: les bassins d’habitations ne sont pas aussi des bassins d’emplois. Ce découpage entraîne donc des déplacements importants au quotidien. Or selon la chercheuse, cette situation ne risque pas de s’arranger avec les projets de développement des transports en commun actuellement, qui conservent cette logique.

« On veut que les Franciliens se déplacent à vélo mais on investit massivement dans le Grand Paris Express (le réseau de métros en dehors de Paris, dont certaines lignes sont en cours de construction, ndlr) à hauteur de 40 milliards d’euros, quand le Plan Vélo représente seulement un effort de 200 millions d’euros », souligne Sylvie Landriève.

Autre obsession francilienne que traduit également le Grand Paris Express, penser qu’il faut absolument pouvoir rejoindre n’importe quel endroit facilement depuis n’importe où, en considérant toute l’Ile-de-France comme un immense bassin d’emploi « fermé ». Une idée fausse dans le sens où, à l’aéroport Roissy par exemple, de nombreuses personnes viennent travailler depuis d’autres régions limitrophes, en utilisant leur voiture.

La grève, l’occasion de réfléchir à nos déplacements du quotidien
L’étude « Post-Car » préconise en conséquence des changements radicaux de politiques publiques pour réellement envisager un avenir sans voiture. En premier lieu, écouter les attentes des Franciliens qui affichent clairement leur volonté de ralentir leur rythme de vie et stopper la politique de densification et d’accroissement de la population de la région.

En termes d’organisation du territoire, l’étude propose de favoriser l’autonomie des « sous-espaces », en reliant davantage zones d’habitation et zones d’emploi situées à proximité. La « zone intense » entre Versailles et Saint-Quentin en Yvelines représenterait par exemple un modèle à suivre.

Dernière recommandation intéressante: faire la chasse aux déplacements inutiles, qui favorisent la congestion et donc la pollution. Avec le mouvement de grève, qui démarre ce 5 décembre, la difficulté plus importante qu’en temps normal pour se déplacer représentera au moins un bon moyen de réfléchir à la manière dont doit évoluer la mobilité dans les années à venir.

© bfmtv.com

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