Décès de Charles Aznavour : 72 ans de métier en 5 morceaux et anecdotes

« La Bohème », « Hier encore »,…suite au décès de la légende de la chanson française, voilà des intitulés que même les moins de 20 ans connaissent.

Parfois, l’emploi de l’expression « monstre sacré de la chanson française » est généralisé. Mais pas dans son cas. Charles Aznavour, à 94 ans, nous a quitté le 1er octobre dans sa maison du sud de la France. L’artiste est parti, mais son oeuvre restera immortelle.

En 1996, l’œuvre totale de Charles Aznavour était ressortie à l’intérieur d’un coffret collector : 33 CD pour un poids de huit kilogrammes. Dur, par conséquent, de synthétiser en deux ou trois intitulés une carrière musicale longue de soixante-douze années, et fortuné d’autant de périodes, d’influences et de triomphe populaires. Mais voilà 5 morceaux qui ont marqué les mémoires.

  • Je m’voyais déjà, 1960

« A dix-huit ans j’ai quitté ma province
Bien décidé à empoigner la vie
Le cœur léger et le bagage mince
J’étais certain de conquérir Paris »

C’est au sein d’un hôtel à  Bruxelles que Charles Aznavour a écrit ces paroles, inspirées – dira-t-il – par  artiste musical qui essayait difficilement de concentrer tous les regards de la foule au sein d’un bistrot où l’Arménien avait échoué des heures plus tot. Mais la légende prêtera encore à ce titre une dimension autobiographique.

Détecté en 1946 par  la chanteuse Edith Piaf, l’artiste a du mal à s’imposer. Son physique piètre, sa voix si particulière et son esthétique ne charment pas. En 1960, le jeune Arménien attend toujours la gloire qui réalisera sa carrière. Charles Aznavour décide de proposer d’abord à Yves Montand d’interpréter ce texte, mais celui-ci n’accepte pas. Le 12 décembre 1960, il chante dans la pièce parisienne de l’Alhambra, l’énorme music-hall sis à proximité de la place de la République. Le public n’adhère pas et les six premiers intitulés sont réceptionnés froidement. Aznavour entonne Je m’voyais déjà et apporte un changement brutal la soirée. Ce sera le premier tube de sa carrière.

  • La Mamma, 1963

« Ils sont venus
Ils sont tous là
Dès qu’ils ont entendu ce cri
Elle va mourir, la mamma »

C’est une chanson qui concerne les personnes qui ont dû ire au revoir à leurs chers parents. Ecrite par Robert Gall – le parolier français –, le titre ne trouvait malgré tout pas d’orchestrateurs pour être mise en musique. C’est là que Charles Aznavour s’en empare et dira avoir écrit la musique « très rapidement ».

  • Hier encore, 1965

« Hier encore j’avais vingt ans
Mais j’ai perdu mon temps
A faire des folies
Qui ne me laissent au fond
Rien de vraiment précis
Que quelques rides au front
Et la peur de l’ennui »

Cet homme n’a plus 20 ans. Même, il en a plus de quarante. Le temps de la nostalgie et du deuil d’une innocence perdue. Une ritournelle affectée qui se met  vite universelle : Charles Aznavour archivera cet album en italien – Ieri Si – en anglais – Yesterday When I Was Young – en japonais – 帰り来ぬ青春 – et en espagnol – Ayer Aún.

  • La Bohème, 1965

« Et si l’humble garni
Qui nous servait de nid
Ne payait pas de mine
C’est là qu’on s’est connu
Moi qui criais famine
Et toi qui posais nue  »

Sur scène, il la chantait encore avec un mouchoir blanc dans la main, synonyme de jeunesse éternelle et innocente. A la fin de son interprétation, il laissait chuter le mouchoir, pour rappeler cette période terminée. C’est en 1965 que le célèbre Jacques Plante vient voir Charles Aznavour, qui enchaîne les performances comme For me, formidable ou Que c’est triste Venise. Il n’a pour l’instant que la première phrase, « Je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas  connaître », mais elle doit à inspirer la star qui se propose au piano. Les personnages complètent le texte, s’inspirant de leurs anecdotes de vie parisienne. Georges Guétary l’entend et tombe sous le charme. Il sera le seul à la chanter sur scène, dans l’opérette Monsieur Carnaval, mise en scène par Maurice Lehmann.

Mais devant la passion de la foule, Charles Aznavour prend la décision de l’enregistrer en 1966, avec l’orchestre de Paul Mauriat. Le 33-tours sera écoulé au delà d’un million d’unités – un triomphe qu’aura mieux du mal à lui pardonner Georges Guétary. Plus qu’une musique, La Bohème est l’hymne d’une dynastie et d’un Paris.

  • Emmenez-moi, 1967

« Moi qui n’ai connu toute ma vie
Que le ciel du Nord
J’aimerais débarbouiller ce gris
En virant de bord »

Ce titre est un cadeau de son beau-frère, Georges Garvarentz. L’époux de sœur aînée, Aïda, compose la musique et rédige ce texte qui parle d’exil et de misère. Charles Aznavour la déclinera aussi en anglais en 1978, sous l’intitulé Take me Along, sur le disque We Were Happy Then. Elle est l’un des morceaux qui illustre l’énorme triomphe de l’artiste aux states, ce qui lui vaudra particulièrement une étoile sur le célèbre Walk of Fame de Los Angeles.

Charles Aznavour, en quelques dates

22 mai 1924 Naissance à Paris.

1933 Débute dans de petits rôles au théâtre et au cinéma.

1942 Rencontre Pierre Roche qui met en musique ses textes.

1946 Rencontre Edith Piaf.

1948 Enregistre ses premiers disques.

1955 « Sur ma vie ».

1963 « La Mamma ». Triomphe à New York.

1964 « Que c’est triste Venise ».

1972 « Comme ils disent ».

1989 « Pour toi Arménie ».

2015 « Encores », dernier album.

1er octobre 2018 Mort à son domicile dans les Alpilles (Bouches-du-Rhône).